Entretien avec le chef pâtissier de la Maison Ladurée.
Nous profitons de l’ouverture du salon de thé Ladurée au Gourmet pour nous entretenir avec Julien Alvarez, chef pâtissier exécutif de la vénérable maison depuis 2021. L’occasion d’en apprendre plus sur sa touche de pâtissier, ses créations et la manière dont elles dialoguent avec l’héritage d’une institution gourmande plus que centenaire.
Entretien avec Julien Alvarez, chef pâtissier de Ladurée
Félicitations pour l’ouverture du corner Ladurée au Gourmet des Galeries Lafayette ! Qu’est-ce que cette nouvelle adresse représente pour Ladurée et qu’est-ce qui vous a plu dans l’idée de vous installer ici ?
Merci beaucoup. Cette nouvelle adresse est une fierté pour nous. Le Gourmet des Galeries Lafayette est une vitrine de la gastronomie parisienne, un lieu de passage et de découverte pour les amateurs de goût du monde entier. C’est un écrin parfait pour faire rayonner l’élégance et le savoir-faire de Ladurée. J’ai tout de suite été séduit par l’idée de proposer notre univers dans un lieu aussi emblématique, qui conjugue tradition, exigence et modernité.
Si vous deviez décrire Ladurée en trois mots, lesquels choisiriez-vous ?
Héritage, élégance et gourmandise.
Ladurée est une maison avec une histoire riche, fondée en 1862. Comment parvenez-vous, en tant que chef pâtissier, à honorer cet héritage tout en apportant votre propre touche contemporaine aux créations ?
C’est un équilibre délicat, mais passionnant. Je me considère comme un passeur : je puise dans l’histoire de la Maison pour en faire naître quelque chose de nouveau, fidèle à son ADN, mais ancré dans notre époque. Mon objectif est de proposer une pâtisserie lisible, épurée et expressive. L’héritage de Ladurée me guide, mais je cherche toujours à y apporter une touche de justesse et de modernité. C’est dans cette tension entre tradition et création que se trouve, selon moi, la magie.
Le macaron est l’emblème de Ladurée et vous avez dit qu’il était le plus sérieux des défis, nécessitant de « convaincre en deux bouchées ». Qu’est-ce qui rend un macaron Ladurée si unique et inimitable ?
Le macaron Ladurée, c’est une signature. Derrière sa simplicité apparente, il y a un travail d’orfèvre : la justesse des textures, l’équilibre des goûts, la maîtrise des gestes. Chaque détail compte et il faut séduire instantanément. C’est cette exigence permanente, cette quête de la perfection dans la gourmandise, qui rend notre macaron unique. Et puis il y a cette élégance propre à la Maison, ce raffinement intemporel.
« Eugénie », votre création de 2023, rend hommage à l’impératrice Eugénie. Comment une figure historique peut-elle inspirer une création gourmande ? Et qu’est-ce qui rend l’Eugénie si spéciale ?
L’impératrice Eugénie incarne une époque, un style, un art de vivre à la française. Elle est contemporaine de la fondation de Ladurée et représente cette idée de goût, d’élégance et de raffinement que nous voulons transmettre. L’Eugénie, c’est une gourmandise structurée, généreuse, aux textures contrastées : un sablé croustillant, un cœur fondant praliné ou caramel et un enrobage chocolat. Elle reflète parfaitement mon approche : une simplicité maîtrisée, où chaque élément a sa place.
Vous recherchez la « justesse » et la « simplicité maîtrisée » dans vos créations. Pourriez-vous nous donner un exemple concret d’une pâtisserie où cette approche est particulièrement visible et nous expliquer pourquoi ?
Je pense à notre tarte soufflée au chocolat. Elle semble très simple, mais elle demande une précision technique extrême. Il faut que tout soit parfaitement dosé : le fond de tarte, le soufflé, la cuisson. Rien n’est laissé au hasard. C’est une création qui parle d’elle-même, sans fioritures, mais qui laisse une empreinte mémorable. C’est là que réside la vraie sophistication : dans l’essentiel, dans la justesse.
Quelle est la réaction la plus drôle ou la plus mémorable suscitée par l’une de vos créations ?
Je me souviens d’une dégustation où j’avais préparé des marbrés et les avais disposés… sur du marbre. Les teintes étaient tellement proches que personne ne les avait remarqués. Quand j’ai commencé à les découper, les convives ont eu un moment de stupeur en pensant que je tranchais littéralement du marbre ! Leur surprise, suivie d’un grand éclat de rire, reste un souvenir très amusant.
Quel est votre péché mignon en matière de gourmandise, celui pour lequel vous craquez sans hésiter ?
Le chocolat, sans hésitation. Un Eugénie chocolat, un macaron chocolat, ou même nos Perles… C’est presque une addiction. Le soir, c’est mon rituel : lorsque la journée est terminée et que mes enfants sont couchés, je m’accorde une vraie pause. Un simple carré de chocolat devient alors le plus beau des plaisirs pour clôturer la journée.